Contexte

Date de mise à jour : 5 juin 2013

L’agroforesterie est l'activité qui associe sur les mêmes parcelles une vocation mixte de production agricole annuelle (cultures, pâture) et de production différée à plus ou moins long terme par les arbres (bois, fruits, services).

Elle compte parmi les pratiques traditionnelles d’exploitation des sols existant depuis des siècles sur tous les continents. L’agroforesterie peut être considérée comme un modèle prometteur d’agriculture durable, sous réserve d’en mieux comprendre et maîtriser les facteurs de production. En effet, bien que les systèmes agroforestiers (SAF) aient souvent été remis en cause pour leur plus faible production agricole que les monocultures, ils ont une contribution importante à la production globale et au développement du fait de leur part importante dans les surfaces agricoles et les sociétés rurales des zones tropicales.

Les SAF présentent différents atouts comparativement aux monocultures dont les impacts environnementaux et sanitaires ainsi que la vulnérabilité socio-économique risquent de fortement limiter les progrès futurs. De façon générale, les  systèmes agricoles sont sources de services écosystémiques, mais aussi de « disservices » (perte de biodiversité, pollution agrochimique, érosion des sols, émissions de GES) (Power, 2010). Comparativement aux monocultures, les SAF déplacent l’équilibre entre la fourniture de services écosystémiques et de « disservices ». Moins consommateurs d’intrants et d’énergie, ils combinent des services écologiques et des productions diversifiées tout en procurant une sécurité foncière. Dans les SAF, les services d’approvisionnement sont impactés par la modification du rendement de la culture de base et par de nouvelles productions qui contribuent à la diversification des revenus des producteurs et à leur sécurité alimentaire. Les SAF contribuent aux services de régulation, en particulier par le contrôle du cycle et de la qualité de l’eau, la régulation du climat à travers le contrôle des émissions de GES et du stockage de carbone. D’autre part, selon leur composition, leur structure et leur gestion, les SAF peuvent contribuer de façon importante aux services de support qui soutiennent les autres services. Parmi ces services on peut citer : la productivité primaire, le contrôle des bioagresseurs, la conservation des sols, la régulation du cycle des nutriments et de l’eau, la préservation de la biodiversité. Ils procurent également des services culturels au bénéfice de la communauté. Ils apparaissent donc comme un mode de production potentiellement stable dans le temps et résilient par rapport au changement climatique et à la variation des marchés internationaux. Ils semblent ainsi plus sécurisants que les monocultures pour les communautés rurales qui les pratiquent et les consommateurs qui en dépendent. L’agroforesterie constituerait donc l'une des solutions à mettre en œuvre pour faire face au défi de l’intensification écologique des agro-écosystèmes (produire plus et mieux avec peu d’intrants). Aussi les SAF recèlent-ils un potentiel important d’amélioration de la productivité encore peu exploré, notamment dans les domaines de :

  • l’optimisation des interactions arbres-cultures du point de vue de l’utilisation des ressources du milieu et de la diversification des productions,
  • le développement de variétés adaptées aux conditions agroforestières,
  • la gestion des bio-agresseurs avec peu ou pas de pesticides,
  • le maintien d’une biodiversité utile à la productivité primaire et aux services environnementaux,
  • la vulnérabilité des systèmes face aux perturbations.

Le projet SAFSE proposé s'inscrit dans le cadre actuel d'un intérêt grandissant pour l’agroforesterie comme réponse aux défis majeurs auxquels sont confrontés les pays tropicaux : pauvreté, insécurité alimentaire, changement climatique, perte de biodiversité. En effet, les mécanismes sous-jacents à la résilience supposée des SAF ne sont pas encore bien connus. L'une des causes principales tient au fait qu'ils sont probablement de nature et d’ampleur différentes selon que l’on considère la résilience conférée par les relations de facilitation/compétition dans le système biophysique et celle conférée par la diversité et la flexibilité de la structure à l’échelle de l’exploitation, ou du territoire, elle-même reliée aux contraintes socio-économiques. Une autre cause importante tient au fait que les politiques publiques en matière agricole, dans les zones tropicales, ont jusqu’alors manifesté peu de considération envers l’agroforesterie du fait même qu'elle y est traditionnelle, préférant souvent concentrer leurs actions sur les monocultures vivrières ou de rente, ou alors faire abstraction de la composante arborée des systèmes. En région tropicale humide, les SAF à base de cultures pérennes sont très répandus. Il existe tout un gradient de complexité de ces systèmes et un gradient d’intensité de gestion. En région sèche en Afrique sub-saharienne, les parcs arborés et arbustifs sont aussi la base d'une agriculture vivrière encore particulièrement précaire. Dans ces deux régions, les SAF connaissent des dynamiques contrastées et sont portés localement par une grande diversité d’acteurs et de pratiques dans des contextes également très différents. C'est cette diversité que le projet SAFSE a l'ambition d'aborder et de conceptualiser, en fédérant des équipes du Cirad, de l'IRD et de leurs partenaires nationaux ayant une expérience solide de ces milieux. Les résultats escomptés devraient permettre d'éclairer le choix des acteurs et des décideurs de ces régions entre une sécurité alimentaire immédiate, à la durabilité mise en doute par une vulnérabilité forte aux changements globaux, et une sécurité alimentaire sur le long terme, grâce à une production autonome, diversifiée, contribuant à une résilience accrue des agrosystèmes et des sociétés qui en dépendent.

Date de mise à jour : 5 juin 2013